DHG : tout le monde va payer la « mixité sociale »

rentree-surchargee-672x372Depuis début février, le rectorat tente d’imposer à une quinzaine de collèges de l’aire urbaine de Toulouse des dotations horaires globales (DHG) indécentes. Ces baisses de moyens injustifiées leur promettent des classes à plus de 30 élèves à la rentrée 2017 et bafouent la loi de 2005 sur l’intégration des élèves en situation de handicap. Une conséquence jusqu’ici invisible du projet « mixité sociale. »

Des DHG indigentes dans les collèges périurbains.

Les DHG des collèges de Haute-Garonne sont tombées étonnamment tard cette année : début février, juste avant les vacances. Il a fallu un certain temps pour se rendre compte que de nombreux collèges de l’aire urbaine de Toulouse se voyaient privés de moyens et de divisions sans avoir de baisses d’effectifs, en particulier au sud et au nord-est : Auterive, Carbonne, Cazères, Muret (Louisa Paulin), St-Orens, Bessières, Fronton…

Pour presque tous ces collèges, c’est la certitude d’avoir des classes à plus de 30 élèves en septembre, et donc des conditions d’enseignement encore plus dégradées qu’elles ne le sont déjà, sans parler des postes partagés pour les collègues. Nombre d’entre eux se sont bien sûr mobilisés le plus rapidement possible malgré l’entrave (certainement involontaire…) que constituaient les vacances scolaires. Mais comment le rectorat tente-t-il d’imposer cette cure d’austérité ?

Les estimations « objectives » du rectorat.

Il faut savoir que la DOS, service du rectorat chargé des estimations des besoins et de la répartition des moyens, procède à des estimations d’effectifs à la rentrée théoriquement basées sur les remontées des effectifs réels pour chaque établissement qui sont ensuite rectifiées… Mais impossible d’avoir des explications sur le mode de calcul menant à ces rectificatifs, la DOS se murant dans le silence.

On sait juste que pour cette année de purge, les effectifs des collèges sacrifiés ont été systématiquement revus à la baisse. Un exemple concret : au collège de Carbonne, 129 élèves formant actuellement cinq classes de 5e ne seraient plus que 120 répartis en quatre classes de 4e, permettant ainsi d’économiser une division.

Lors des entretiens entre différentes délégations de ces établissements et des représentants du rectorat, le seul élément avancé pour justifier les « pertes » d’élèves envisagés a été le taux de redoublement estimé sur 3 ou 4 ans en arrière alors que le redoublement a été supprimé par la réforme du collège.

Plus « étonnant » encore, dans le Sud Toulousain, ce sont quatre établissements voisins ou proches (Auterive, Muret, Carbonne, Cazères) qui subiraient des baisses d’effectifs à la rentrée, donc de moyens et de divisions. Pourtant, tout indique que la croissance démographique de cette zone est plus forte encore que celle de la moyenne de la Haute-Garonne, il suffit de consulter les données de l’INSEE pour s’en rendre compte avec l’exemple du Volvestre ci-dessous :

insee-demo-volvestre

Le rectorat parvient donc à déduire une baisse du nombre de collégiens d’une forte croissance démographique de la population… sans la moindre justification crédible. Mais comme cela ne suffit pas à faire assez d’économies, il faut aller plus loin encore.

« L’oubli » des élèves d’ULIS…

Beaucoup de collèges concernés ont le point commun d’avoir des SEGPA mais aussi des dispositifs d’ULIS. Or, dans les cas les plus litigieux, pour ne pas dépasser dans les estimations le seuil de 30 élèves qui nécessiterait une classe en plus, le rectorat n’y est pas allé par quatre chemins : il a « oublié » les élèves d’ULIS pourtant inscrits dans les divisions classiques.

De fait, avec 30 à 32 élèves par classe, impossible d’accueillir les élèves d’ULIS ou de SEGPA qui devraient l’être faute de place et de sécurité (en collège, quasiment aucune salle de cours n’est prévue pour recevoir plus de 32 personnes).

Pourtant, la circulaire n° 2015-129 du 21 août 2015 qui définit les détails de la loi de 2005 spécifie clairement que :

 « La loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées dispose que le parcours de formation des élèves en situation de handicap se déroule prioritairement en milieu scolaire ordinaire.

La loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République a introduit dans le code de l’éducation le concept d’école inclusive et engage tous les acteurs dans une nouvelle conception de la scolarisation des élèves en situation de handicap (…) »

Ne reculant devant aucun argument, y compris les plus spécieux, la DOS accuse ceux qui lui rappellent la Loi de faire du « juridisme » (sic) tout en expliquant qu’une circulaire n’est pas une loi (autrement dit : on a le droit de s’asseoir dessus si c’est plus confortable). Pourtant, la loi de 2005 existe bel et bien, et le rectorat prend donc sciemment le pari que parents et enseignants baisseront les bras et ne se mobiliseront pas.

Alors que la ministre continue à faire son autopromotion sur le thème « l’école inclusive » (http://www.najat-vallaud-belkacem.com/2016/12/02/ecole-inclusive-25-deleves-en-situation-de-handicap-scolarises-depuis-2012/) , son ministère donne à des rectorats complices des moyens ridiculement bas moyens qui ne permettent même plus d’appliquer la Loi. Ou comment ajouter l’hypocrisie la plus cynique à l’austérité la plus délétère.

Où vont les moyens détournés ?

Les économies que le rectorat cherche à réaliser en rognant des moyens un peu partout ne semblent avoir qu’une explication logique : le projet de mixité sociale du CD 31.

En effet, pour détruire tranquillement Badiou et Bellefontaine, le conseil département a besoin d’acheter la paix dans les cinq collèges favorisés qui vont recevoir les élèves déracinés du Mirail. Il s’agit là d’établissements dont il convient de ménager les usagers : contrairement aux habitants des quartiers défavorisés, ils ont encore une fâcheuse tendance à voter ; davantage que les populations périurbaines, ils sont concentrés, organisés et représentent un poids socio-culturel important pour les élus.

Main dans la main, le département et le rectorat ont donc promis de ne pas dépasser 25 élèves par division dans ces établissements, ce qui implique des moyens transitoires supplémentaires. Mais rappelons-le : le but de tout cela est de faire des économies, pas de dépenser plus. La seule solution pour financer ces « largesses » était donc de transférer des moyens pris ailleurs.

Le conseil départemental, dans sa volonté d’imposer son projet au bulldozer, et les responsables du rectorat, ne cherchant qu’à faire des économies pour sauver leurs primes, ont donc décidé de tricher sur les chiffres pour prendre à des communes qui souvent ont déjà peu : le taux de classes sociales défavorisés y est très important comme l’illustre la carte ci-dessous.

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Des mobilisations à poursuivre et à fédérer

Face à ces décisions iniques, parents et personnels des collèges concernés se mobilisent à travers les motions en CA et les votes négatifs, les grèves, les lettres à Carole Delga, à la rectrice ou au ministère, les audiences au rectorat.  Quelques exemples :

Faisons converger ces luttes pour leur donner plus d’audience et de lisibilité !